Je suis venue sans chevalet.
Sans carnet.
Juste avec les yeux grands ouverts.

À Pont-Aven, on ne vient pas peindre.
On vient comprendre pourquoi d’autres l’ont fait.

Une rivière lente, comme une idée

La rivière serpente, glisse, chuchote.
Elle passe sous les moulins, entre les pierres.
Elle n’attend pas.
Mais elle offre.

Et Cléo, en marchant sur les berges, sent que chaque reflet est une esquisse.

"Ici, même les ombres ont été choisies," pense-t-elle.

L’école sans murs

Dans les ruelles, les galeries fleurissent.
Pas criardes. Pas envahissantes.
Juste présentes.
Comme si la peinture n’était pas un métier, mais une manière de dire bonjour.

Elle passe devant l’auberge Gloanec, où dormaient Gauguin, Sérusier, Maufra.
Elle n’entre pas.
Elle écoute la lumière qui glisse sur les volets.
Elle lit sur une plaque :

"Ici, les artistes payaient en croûtes."
Et elle sourit.

Un musée à ciel ouvert, et à l’abri

Le musée de Pont-Aven est là aussi.
Intime. Bien pensé.
Mais Cléo préfère les tableaux naturels :
le lierre, les murs, les regards en terrasse.
Et cette sensation étrange que tout est calme mais prêt à jaillir.

En partant, les doigts tachés d’imaginaire

Cléo n’a rien peint.
Mais elle repart couverte de couleurs invisibles.
Celles que l’eau dépose.
Celles que les pierres conservent.
Celles que le vent murmure, quand on prend le temps de ne rien faire.