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đ§ Quand lâAOP tue le goĂ»t : lâalibi normatif au service des puissants


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Frison Gaspier

Elle devait protĂ©ger les savoir-faire, cĂ©lĂ©brer les terroirs, garantir lâexcellence. LâAOP est devenue une armure dorĂ©e pour les industriels. DerriĂšre le logo rouge et jaune, des fermes Ă mille bĂȘtes, des fromageries qui produisent âlocalâ Ă lâĂ©chelle dâun dĂ©partement entier, et des artisans exclus pour avoir utilisé⊠du sel non conforme. La norme a remplacĂ© le goĂ»t. Et le consommateur achĂšte une promesse qui ne dit plus rien.
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LâidĂ©al sur papier
LâAppellation dâOrigine ProtĂ©gĂ©e : trois mots qui rassurent. Trois mots qui sentent la paille, le lait cru, le savoir-faire transmis au fil des gĂ©nĂ©rations.
Depuis les annĂ©es 1990, lâAOP promet au consommateur europĂ©en que ce quâil achĂšte nâest pas une vulgaire copie, mais le fruit dâun territoire et dâune mĂ©thode. Elle protĂšge les terroirs contre la mondialisation. En thĂ©orie !
La France adore ses AOP. Fromages, vins, charcuteries, huiles⊠Plus de 450 produits arborent fiĂšrement le label. Le ComtĂ©, par exemple, câest 66 000 tonnes vendues en 2023. Un succĂšs Ă©clatant.
Mais derriĂšre la vitrine du terroir, lâarriĂšre-boutique mĂ©rite une visite.
Des normes qui mangent le vivant
Les AOP vivent sous la dictature du cahier des charges. On y lit tout : type dâalimentation autorisĂ© - durĂ©e dâaffinage - races animales - zones gĂ©ographiques millimĂ©trĂ©es. On croirait parfois lire un texte de droit administratif.
Et tant pis, si, pour sâadapter aux conditions locales, il faudrait un peu de souplesse.
Un jeune producteur de brebis en AriÚge a vu son dossier refusé pour avoir salé à la main avec du sel non homologué.
Un autre, en Savoie, a Ă©tĂ© recalĂ© car son alpage Ă©tait Ă 300 mĂštres hors zone dĂ©limitĂ©e. Une clĂŽture administrative qui nâĂ©pouse plus aucun relief.
Dans de nombreuses AOP, les rÚgles sont rédigées et verrouillées par les syndicats agricoles dominants, souvent proches de la FNSEA.
Le résultat ? Des cahiers des charges calibrés pour les grosses structures, rarement pour les gestes artisanaux.
En voulant garantir lâauthenticitĂ©, on a construit une forteresse oĂč lâexcellence ne rentre que sur dossier.
Le grand festin des industriels
Car ceux qui ont les moyens de sâaligner, ce sont rarement les bergers des Hautes-Alpes. Ce sont les coopĂ©ratives mastodontes, les gĂ©ants du lait, les groupes agroalimentaires discrets.
Prenez le Roquefort : trois entreprises en détiennent 80 % de la production. Le Comté ? De grandes fruitiÚres aux installations dernier cri.
Le lait arrive par camions, le âlocalâ est respectĂ© Ă la lettre, mais sans Ăąme. On affine Ă la chaĂźne, on calibre, on plastique. Et le goĂ»t ? Il est conforme. Parfois excellent. Parfois⊠stĂ©rilisĂ©.
LâUnion EuropĂ©enne, soucieuse de dĂ©fendre juridiquement ses labels, pousse Ă des normes toujours plus homogĂšnes.
Résultat : une conformité rassurante pour les marchés⊠mais qui nivelle les terroirs par le rendement, puis par le vide.
LâAOP devient alors une arme commerciale. On la colle en tĂȘte de gondole. Elle rassure. Et elle Ă©touffe. Car les petits, eux, nâont plus le droit de vendre autrement. Produire âĂ cĂŽtĂ© deâ lâAOP, au risque de faire mieux, devient suspect, intolĂ©rable, presque hĂ©rĂ©tique aux yeux de la doxa des apĂŽtres de l'euro.
Ce libĂ©ralisme lĂ , n'aime pas la libertĂ© : il prĂ©fĂšre l'ordre. Toujours, il sâagit de favoriser lâintĂ©grationnisme.
Ce que lâĂ©tiquette ne dira jamais
Ma grand-mĂšre nâavait pas dâAOP. Elle nâavait mĂȘme pas de frigo, dâailleurs !
Mais son fromage avait un goĂ»t. Un fromage Ă pĂąte dure, affinĂ© sous torchon, avec parfois un peu de moisissure en coin... la bonne, celle quâon ne fabrique pas en laboratoire.
Aujourdâhui, elle nâaurait pas le droit de le vendre. Pas la bonne race de vache. Pas le bon sel. Pas la bonne cave.
Mais tous ceux qui lâont goĂ»tĂ© sâen souviennent.
LâAOP a retournĂ© le rapport de force. LâĂ©leveur nâĂ©lĂšve plus. Il obĂ©it. Câest un ouvrier sans salaire, sans contrat, avec juste un blason sur lâemballage. Il nâa quâun droit : marcher droit ou crever.
Le consommateur trahi ?
LâAOP reste un outil puissant. Elle a permis de sauver des appellations en voie de disparition. De dĂ©fendre certains producteurs contre la copie Ă©trangĂšre. De crĂ©er de la valeur ajoutĂ©e.
Mais elle est Ă la croisĂ©e des chemins. Si elle continue de servir dâĂ©cran Ă lâindustrialisation, elle ne protĂ©gera plus rien, sauf les intĂ©rĂȘts de ceux qui la contrĂŽlent.
Et le goĂ»t, le vrai, celui qui sort dâun geste imparfait mais sincĂšre, finira relĂ©guĂ© Ă la marge. Hors du champ. Hors norme.
Et puis, il faut le dire : le coupable, ce nâest pas que le systĂšme. Le consommateur n'est pas seulement trahi, il est complice.
Nous qui sommes capables de payer un sac dix fois sa valeur pourvu quâil porte le bon logo, mais qui trouvons âexagĂ©rĂ©â le prix dâun vrai Pont-lâĂvĂȘque fermier.
Nous qui exigeons lâauthentique, mais achetons le conforme.
Le goĂ»t a un prix. Ce nâest pas celui du label. Câest celui du circuit court, du geste, de la saison, de la vie autour.
đ§ Cet article a été coécrit avec l’intelligence artificielle. Il vous a plu, surpris, enrichi ? Soutenir, c’est partager :
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Le fromage que lâIA ne comprenait pas

Jâavais tout pour le dĂ©tecter : base de donnĂ©es AOP - algorithmes sensoriels - 8 milliards de critĂšres.
Mais il mâa Ă©chappĂ©. Un fromage, sans code ni label, que personne ne mâavait demandĂ© dâanalyser. Et pourtant⊠câest lui que je nâai pas su oublier.